Grand Débat National : Inclusion et Handicap

Dimanche dernier, K. et moi recevions un message d’une copine handi, J. : « Hey les amis, une asso m’a dit qu’il y avait un débat sur le handicap avec Olivier Véran (député de l’Isère) et Sophie Cluzel (secrétaire d’état en charge des handis), vendredi! La personne de l’asso m’a dit « je ne t’ai rien dit », ha ha. On y va?? »

Ni une, ni deux, on s’inscrit à ce débat « ouvert à tous » mais uniquement diffusé au près des grandes associations. Je n’en trouverai aucune trace sur la page facebook du député ou dans les médias jusqu’au moment où la billeterie affichera complet, là tout d’un coup, on a vu apparaître l’annonce. Un concept du « ouvert à tous » un peu bizarre mais soit.

Avec K. et J., on commence à un peu discuter sur Messenger mais très vite nous décidons de nous voir en « vrai » pour préparer un peu. Ainsi, le mercredi soir nous nous réunissions chez moi autour de pizzas. Nous n’avions aucune illusion, nous savions que ce serait très dur d’avoir la parole au milieu d’associations et nous imaginions déjà un débat très verrouillé, quatre tables rondes thématiques étaient annoncées sans plus de précision. Nous avons donc décidé de préparer juste trois questions résumant les thématiques chères à chacun d’entre nous :

K. : A une époque où l’autonomie individuelle est revendiquée, comment justifier la dépendance financière vis à vis d’un conjoint valide notamment pour les personnes en incapacité de travailler?*

J. : Comment en 2017, un établissement scolaire, établissement de centre-ville, très bien réputé,  peut-il refuser un jeune prof handi  2 semaines avant la rentrée car l’établissement n’est pas accessible, l’envoyant dans un collège REP de banlieue?

Moi : Comment justifier que l’entretien du logement et la cuisine qui sont des bases fondamentales pour la dignité humaine ne sont pas compris dans la pch (prestation de compensation du handicap)?

Le grand jour arrive, nous nous rendons ensemble à la Maison des Associations, lieu du Débat. Il y a déjà beaucoup de monde, les fauteuils sont en nette minorité mais bon, n’oublions pas qu’il y a les « handicaps invisibles »…
Nous distinguons les 4 tables rondes, nous demandons les thématiques : « Loisir », « Société », « Ecole », « Travail ». Nos questions seraient plutôt en lien avec « Société » mais cette table étant submergée de monde, nous pensons plus stratégique de nous installer à « Travail » pour avoir une chance d’avoir la parole. Nous nous installons. Nous avons un sourire en coin car les gens sur 2 jambes autour de la table nous tournent ostensiblement le dos et mettent dix bonnes minutes à réaliser que ce serait peut-être intéressant d’élargir le cercle pour inclure les fauteuils. Bref!
La secrétaire d’Etat arrive avec sa délégation, nous entendons « la consigne est de se lever ». Nouveaux sourires en coin.
Après un discours de Sophie Cluzel « Je suis là pour vous écouter », les choses sérieuses commencent. On nous distribue des post-its sur lesquels nous devons écrire des « diagnostics » et des « propositions ». J. y écrit son expérience de prof agrégée envoyée en REP, K. se débrouille pour rattacher « l’AAH et le conjoint » à la thématique du travail et moi, j’écris qu’il faut une meilleure prise en charge de la PCH pour que l’on puisse se consacrer à notre vie pro… La table est animée à l’arrache, on s’entend à peine donc je décroche vite et je regarde autour de moi. K. discute avec un journaliste sur l’AAH et J. expose son expérience à d’autres. Tout d’un coup, une dame s’intéresse à J. et moi et nous demande ce que nous faisons dans la vie :
– Agrégée de lettre »,
– Ingénieur de Recherche ».
– Wahoooooooooo!!! Incroyable!!!!! Merveilleux!!! Absolument extraordinaire! Fantastique!  Trop bon!!!!! Il faut absolument que vous veniez témoigner à mes formations, j’essaie de montrer que les personnes en situation de handicap peuvent travailler ». Avec J. nous échangeons un regard disant « Ca va, on n’a pas  décroché le prix Nobel non plus, du calme dans les superlatifs. » Mais nous donnons nos coordonnées, après tout peut-être que cela peut être utile…
Enfin, au bout d’une petite heure, c’est le moment de la restitution donc nous nous installons face à l’estrade, ça peut être le moment le plus intéressant… ou pas. Les rapporteurs se succéderont présentant une synthèse (plus ou moins bien faite, par exemple le post-it de J. a été fondu dans « accessibilité des locaux », le mien dans « des meilleures aides d’accompagnement » et celui de K. a simplement sauté) de leur table ronde, Sophie Cluzel y répondra par des laïus extrêmement bien formatés et à quelques questions du public. Je pense qu’au final il n’y a pas eu plus de 10 questions « spontanées », le micro ne circulant pas car « nous n’avons plus le temps, Mme la Secrétaire a un train à prendre ». A mon sens, Sophie Cluzel a répondu de manière très froide, très technique, n’hésitant pas à « attaquer » sur les mots des questions. Par exemple, une personne l’a interpellée sur les dérogations pour l’accessibilité des lieux publics et « privés », précisant que ce qu’elle entendait par « privé » c’était les restos etc, bref les entreprises privées. Et là, Sophie Cluzel a immédiatement « attaqué » en disant que les restos etc n’étaient pas des lieux « privés » mais des lieux « publics ». Oui… Bon… Et alors?
De mon point de vue, cette phase de restitution et d’échange n’a eu absolument aucun intérêt et Sophie Cluzel a pu avoir son train!

Avons nous été surpris de la tournure de ce débat? Absolument pas, malheureusement…
Peut-être que le point positif a été les échanges avec les journalistes, à voir si cela donne quelque chose dans les prochains jours… Moi à J. et à K. :
« C’étaient des journalistes de quels média?
-Euh… Bah… On sait pas trop en fait :). »

Ah non, il y a un autre point positif, cela nous a donné une occasion de nous voir, J., K. et moi, de manger des pizzas et d’aller au resto en sortant du « débat » 😉 !

* Je vous renvoie vers la vidéo qu’a faite K. sur cette problématique :

La député Marie-Georges Buffet va essayer de proposer une loi le 7 mars pour que l’AAH ne soit plus alignée sur les revenus du conjoint. A suivre…

 

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2 réponses à Grand Débat National : Inclusion et Handicap

  1. Catherine dit :

    Questions simple pour Macron : Pourquoi un travail à temps partiel SUBIT et non choisit pour une maman d’un enfant orphelin de père par exemple n’a aucun statut juridique permettant de reconnaître économiquement cette discrimination ? ( par exemple le calcul de sa pension, le calcul de ses revenus calculés comme si l’enfant pouvait compter sur deux revenus et deux disponibilités ! Soumise à un travail très peu rémunéré y compris pour une maman vivant en couple ? Pourquoi avoir mis ce statut spécifique aux oubliettes ? Pourquoi être condamnée à la précarité à perpétuité malgré un contrat de travail ? …

  2. Di Murro dit :

    La réponse est pourtant simple, il ni a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre et qui en plus n’est pas concerné.

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